San Jose del Pacifico - 2 jours off

San Jose del Pacifico est un tout petit village perche en haut de la montagne.

Le paysage est saisissant et quand la journee se termine, on peut assister au spectacle des nuages qui remontent le long des montagnes et peu a peu se rejoignent pour creer une forme unique qui va grandissant jusqu'á vous atteindre. Le monde a alors une fin. Pour les cinephiles, on a l'impression exacte d'etre dans la matrice.

A San Jose, il y a tres peu de touristes. Ne viennent essentiellement que les personnes attirees par les ressources naturelles du lieu. Les discussions s'enrichissent de vocabulaire mystique: chaman, ondes, magie, perceptions...La litterature de Castaneda est en evidence sur la table.

A Oaxaca, j'ai rencontre un italien qui m'avait chaudement recommande la casa Catalina: "Quand tu arrives, tu prends sur la gauche dans le village et au deuxieme virage en montant, tu vas tout droit".

Je monte avec le velo, me perd mais retrouve finalement mon chemin. Surprise, dans la montee, deux jeunes etrangers m'accueillent: "Tu dois etre Julien". Je leur demande pardon mais finit par comprendre que j'ai ete precede par deux portugais a qui j'avais refile l'adresse de Catalina. Ils me disent que la casa Catalina est juste plus haut a gauche. Enfin j'arrive, et...J'hallucine!

L'endroit pour le coup, est magique. A flanc de montagne, il y a une vue magnifique et puis l'interieur de la maison...je suis saisi des la porte franchie.

Ca commence tres fort mais ca va aussi se degrader rapidement.

Dans la piece commune, il y a trois, quatre personnes autour d'une femme agee, entre sorciere, vieille indienne et hippie mystique: Catalina. Elle apprend a tirer les cartes a une argentine. Celle qui se fait dire la bonne aventure, ecoute religieusement, le sourire beat. Et la vieille femme de sermonner: "les cartes ne mentent jamais".

Je connecte, j'ai atterri dans un haut lieu du hippisme montagnard mexicain.

Personne ne me dit quoi que ce soit et dois attendre la fin du ceremonial, environ 1h pour savoir si il y a possibilite d'avoir un lit pour la nuit. J'arrache un "oui" a Catalina qui ne prend pas le soin de m'indiquer ou je pourrais me decharger de mes affaires. Curieuse hospitalite que celle ci. Je suis fatigue de la montee a San Jose et finalement pose mon devolu sur un matelas a meme le sol dans la salle commune.

J'ai beaucoup suer en montant et demande comment fonctionne la douche. On me repond qu'il n'y a de douches que deux fois par semaine et pas aujourd'hui. Point, pas de "je comprend ta volonte de te debarasser du sel, de la sueur, tu pourrais faire comme ca". Non, juste rien. J'insiste et a force de questions, je finis par comprendre qu'il y a un reservoir d'eau de pluie et je finirais par me laver avec une bassine en m'aspergeant. Enfin, je peux enlever ma tenue de cycliste un peu impromptue au milieu des hippies. Mais j'ai change pour un look "sortie de douche" et j'imagine le questionnement autour de moi: "Mais il n'y a pas d'eau aujourd´hui et en plus, il a du en utiliser beaucoup..."

Durant mes journees de route, j'ai beaucoup echanger, 100% avec des mexicains, a Oaxaca, j'ai connu mes premiers touristes et/ou voyageurs et la encore, j'ai discute longuement de la vie, de la culture mexicaine et globale, de litteratures, d'Histoire, que sais je... Mais la, rien. Il y a des longs moments de silence. Les gens sont peut etre assommes, ca fume enormement.

Finalement, les personnes autour de la table ne me paraissant pas extremement interessants, je decide de me mettre en retrait et de me livrer a une analyse sociologique du groupe. Par retrait, j'entend que je ne fais pas l'effort spontane de vouloir accrocher une discussion ou me presenter quand ce serait possible...

Tout d'abord Catalina. Elle est le centre de la maison. C'est la proprietaire bien sur, mais c'est surtout la clef de voute, l'ame de la maison, celle qui fait dire au jeune hippie qu'il est dans le vrai. Elle a tout, c'est vrai, de la vieille indienne mystique pouvant inspirer le respect et pourtant...

J'ai toujours aime gratter le vernis, connaitre par moi meme mais la je n'aurais pas a gratter, il va s'enlever de lui meme. Cata (c'est son surnom) joue enormement aux echecs et je pense que comme avec chaque nouvel arrivant, elle doit proposer de jouer une partie. Je me fais donc inviter. J'ai eu fait des echecs dans ma prime jeunesse et j'accepte l'invitation. Cata joue tres bien mais je prend bien le temps de reflechir chaque coup et...je gagne.

Incroyable, le tsunami, elle se rengorge, dissimule mal un cote mauvaise perdante et me propose tout de suite la revanche. Le diner vient d'etre servi, je m'excuse arguant que plus tard peut etre. Interieurement, je jubile.

Au menu "chiles rellenos", je precise car s'il y a une chosetres bien a la casa Catalina, c'est la qualite des repas pris en commun. Et...des ma fourchette reposee, Cata revient a l'assaut en m'adressant a demi-mot "Me laisser sur une defaite, c'est mal connaitre l'orgueil d'une vieille indienne mexicaine". Le masque est tombe, la vieille dame est orgueilleuse.

J'accepte la seconde partie mais n'y met pas toute l'attention requise. La partie d'echec pour moi se jouant a un autre niveau, je decide en mon fort interieur qu'il ne faudrait pas contrarier trop fort une vielle femme orgueilleuse, qui plus est quand elle est la piece centrale...Je perd.

Cata retrouve des couleurs et je prend conge. Je n'aurais que peu d'echanges avec elle plus tard. Je tendrais bien l'oreille quand elle voudra me raconter une histoire ancienne ou ira jusqu'a pousser la chansonnette. Mais je ne m'interesserai pas plus a elle apres avoir compris que mes questions concernant son cheminement personnel resteraient sans reponse. En face d'une porte fermee, je m'ouvre rarement.

Les disciples maintenant...

A la casa Cataline, il y a les gens de passage comme moi et les autres qui sont la depis plusieurs semaines, quelques mois ou qui vont et viennent. Souvent ceux de la deuxieme categorie ne payent pas leurs nuits et aident en retour aux taches inherentes a la maison. Une hongroise aide a la cuisine et au nettoyage des parties communes; ce qui est perturbant car dans ce grand ensemble communautaire, tu ne sais pas si tu dois participer au meme niveau que tout le monde ou pas. Surtout, encore une fois, tout est sous entendu, pas d'explications sympathiques dans un sourire, non, au contraire une espece de fierte d'etre la sans payer et d'etre dans les petits papiers de Catalina...

Aussi et c'est, a mon sens, le plus risible, trois jeunes s'occupent de deblayer un terrain et construisent (tentent de construire) ce qui se voudrait un barbecue. Ils passent toute la journee a enlever trois ronces et poncer 10 cm2 de bois. Le mieux, c'est le contentement ostentatoire a la fin d'une journee de labeur!

Le dernier jour, deux jeunes locaux sont venus une apres midi, ils ont refait l'escalier, souder des barrieres garde corps pour une nouvelle terrasse et ont pose un portail...Je ne peux m'empecher de penser qu'il y a travail et occupation de hippies.

Et j'allais oublier les "artesanos", ceux qui passent la journee a faire des colliers et des bracelets pour les vendre ensuite et trouvent ainsi leur moyen de subsistance.

Tous pratiquement sont etrangers. Ok ils voyagent et mangent a leurs faims mais la culture dans tout ca, les echanges sont tres pauvres. Pas de politique, de social...Le vide. Une conversation d une demi heure sur ma route avec qui que ce soit, est beaucoup plus interessante que l'ensemble es discussions entendues sur deux jours.

Si mes mots sont durs, c'est que j'ai meme pense a une autocritique en me disant que peut etre je me trompais alors j'ai pose la question de l'origine du "temazcal" (un bain de vapeur type sauna) car il etait question d'en faire un les jours a venir...j'ai eu une reponse vague...personne ne s'etait vraiment interesse a ce que tous trouvaient formidable a faire car...authentique.

Bon j'arrete de noircir le tableau, l'endroit etait vraiment incroyable et propice aux ressentis mystiques et j'y ai passe deux belles journees...en retrait.

[fond sonore: Pink Floyd, les Beatles et du pop/rock mexicain]